Une ombre se propulsa dans un arbre aux branches couvertes de neige, puis dans un autre. Elle fit ainsi plusieurs bonds, d'arbre en arbre, avant d'enfin s'arrêter. Katarina contrastait tellement avec ce monde immaculé. Son âme noire de psychopathe tranchait avec la pureté de la neige, amas de petits cristaux tissés en dentelle qu'on appelle flocons. Pourtant, la jeune femme aux cheveux violets aimait la neige. Etant née au Moyen Orient, elle n'avait pas eu la chance de connaitre le froid et la glace dans sa jeunesse. Ses mains en coupole, elle ramassa une couche sur la branche au dessus d'elle, et l'admira avec un sourire rêveur. Elle avait envie d'une bonne bataille de boules de neige. N'était-ce pas magique de montrer sa supériorité en envoyant des boules de neige dans la gueule des autres ?

Katarina était arrivée maintenant depuis une semaine dans cette étrange île. Elle avait cherché des moyens de retourner là d'où elle venait, mais ses sens lui indiquaient une puissante force indescriptible entourant les côtes à chaque fois qu'elle s'en était approchée. C'était comme si une barrière magique recouvrait la terre, barrière magique visiblement infranchissable. Elle s'était donc décidée à explorer le terrain, afin d'en savoir plus concernant là où elle avait atterri. Des individus se disant appartenir à une guilde l'avait alors contactée, mais elle n'avait pas exactement saisi ce qu'ils lui avaient dit. Argawaen ? Missions ? Qu'est-ce que c'est que ces conneries ? Elle n'avait pas cherché midi à quatorze heures et s'était rapidement éclipsée, en ayant déjà marre d'entendre les voix de ces crétins.

La voilà partie dans une forêt visiblement entièrement enneigée. Valor avait d'abord tenté de la suivre, mais les bois étaient tellement profonds qu'il avait rapidement abandonné. Il était donc reparti chasser en terrain plus découvert, loin de toute cette neige.

En entendant des bruits de pas en dessous d'elle, Kata reposa sagement la neige qu'elle avait ramassée là où elle l'avait prise, puis remis son capuchon au sombre kaki sur son visage. Sans bruits, elle se pencha afin de voir ce qui se tramait au dessous d'elle. Elle n'aperçut d'abord rien, avant de distinguer une silhouette humaine se déplaçant entre les troncs, laissant des traces de pas dans la neige. La fauconnière sentit immédiatement l'aura magique de l'individu ; ses muscles se tendirent, et elle passa instinctivement la main dans son dos, cherchant la prise de son revolver. Son regard avait retrouvé sa froideur habituelle, et elle fixait la silhouette qui s'était arrêtée quelques mètres plus loin en dessous d'elle. Le silence devint alors presque pesant, que Kata en arrêta presque de respirer.

Sous son regard éberlué, le sol se glaça en quelques fractions de secondes à peine, donnant à la forêt des allures de patinoire. La jeune femme grinça des dents ; l'autre avait sûrement également senti sa présence. Elle attrapa carrément son revolver et le tint à deux mains devant elle, fixant intensément l'humain en dessous d'elle. Toute émotion avait disparue de son visage ; seule l'attente du combat subsistait.

Katarina avait beau ne plus faire aucun bruit, elle n'entendait que ses propres battements de cœur dans l'incroyable silence dont la forêt blanche s'était armée. Elle fixait intensément la silhouette en bas sur le sol qui n'avait plus bougé depuis plus d'une minute. Mais qu'est-ce qu'il branle ? songea-t-elle en fronçant les sourcils.

Elle n'avait pas eu le temps d'aller au bout de sa pensée que l'arbre sur lequel elle était perchée fut heurté par une onde de choc. Saisie, la jeune femme fit le moulin avec ses bras, les yeux écarquillés par la peur de la chute, avant de s'accrocher au tronc glacé comme un koala. Ses gants en cuir noirs rappèrent l'écorce gelée, et elle retint son souffle. Quelques secondes passèrent avant qu'elle ne se rende compte qu'il n'y avait plus de neige sur les branches de l'arbre, et que ce dernier était donc complètement à découvert. Elle se mordit la lèvre en entendant une voix claire résonner. Elle ne comprit pas ce qu'elle disait, mais elle distingua toutefois les intonations d'une femme. Elle resserra sa prise sur son revolver, et jeta un bref coup d’œil à sa ceinture pour vérifier si ses grenades n'avaient pas miraculeusement pris leurs jambes à leur cou pour se sauver. Mais non, les six étaient toujours là, au chaud sous sa cape. Elle se concentra alors mentalement et ferma les yeux, prise d'une puissante énergie spirituelle.

Quelques fragments de seconde plus tard, elle était dans l'arbre d'en face, cette fois ci un sapin ; ainsi même si la femme faisait tomber la neige, elle serait toujours cachée. Mais quelle ne fut pas sa surprise de voir la glace grimper à la vitesse de la lumière sur le tronc de l'arbre où elle était précédemment, et recouvrir entièrement ce dernier ! Les yeux écarquillés, elle balaya sans comprendre la statue de glace du regard. Elle posa de nouveau son regard sur l'individu en bas en réajustant son capuchon.

C'était une femme aux cheveux d'un blond fort clair, attachés en une tresse qui partait sur le côté, devant ses épaules. Elle était vêtue d'une longe robe d'un bleu aussi pur que le cristal. Sa peau était encore plus blanche que celle de Katarina, presque aussi blanche que la neige. La terroriste eut soudain l'impression d'avoir une femme de glace en face d'elle. Sous ses yeux, cette dernière matérialisa alors une épée de cristal dans ses mains, avant de la brandir devant elle. Katarina regretta alors immédiatement de ne pas avoir pris son katana avec elle. Cela aurait été plus drôle de faire un combat singulier à la lame. Toutefois, cette personne tout droit sortie d'un conte de fée n'avait pas l'air sympathique, elle avait même l'air plutôt dangereuse. Il fallait donc qu'elle prenne ceci au sérieux.

Le regard de la jeune femme aux cheveux violets devint fort sombre, n'affichant aucune de ses intentions. Son capuchon tomba alors devant son visage, et très vite Katarina se téléporta, pour arriver immédiatement dans le dos de l'autre femme. Un déclic se fit alors entendre, et Katarina disparut de nouveau, se téléportant cinq ou six arbres plus loin. Elle laissa échapper un sourire qui tendait un peu vers le sadisme, attendant le bruit de l'explosion. En effet, elle venait de lâcher une grenade dégoupillée au sol derrière la reine de glace. Montre moi ce que tu sais faire, glace à la vanille.